Le rôle des femmes dans le rituel d’adoption de l’arbre : une question de point de vue

Résumé

Les chapitres 158 et 162 du Skandapurāṇa décrivent un rituel atypique : l’adoption d’un arbre comme fils par une femme. La base théorique et la liturgie de ce rituel sont enseignées par Śiva à son épouse Pārvatī qui décide, avec son accord, de suivre cette prescription. Trois compilateurs, Lakṣmīdhara, Hemādri et Madanasiṁha, ont cité ce rituel comme une pratique pieuse, ce qui implique qu’entre le 7^ème et le 15^ème siècle, des femmes sans fils ont pu suivre cette prescription. La réalisation d’un tel rite semble pouvoir émanciper la femme qui le célèbre en la libérant de l’obligation d’être mère. Étant donné que le bénéfice de l’adoption est de sauver le père adoptif des enfers, la femme y apparaît plutôt comme l’instrument du salut de son époux. Mais si c’est réellement le cas, pourquoi Pārvatī adopte-t-elle un arbre ? À qui profite cette adoption et quelle en est la finalité ? Afin de déterminer le bénéfice et le bénéficiaire de l’adoption d’un arbre, j’analyse successivement l’enseignement dispensé par Śiva (SP158), sa mise en œuvre par la déesse (SP162), puis les mentions de ce rite au sein des compilations médiévales. À partir de ces trois perspectives, je montre que la compréhension de la portée d’un rituel dépend de son contexte.